Article 143 du code civil
Le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe.
Un contexte historique
Mariage pour tous, mariage gay, mariage homo, mariage entre personnes de même sexe, homosexuels, transexuels, LGBT, autant de termes qui renvoient à une réalité plurielle. Le mariage comme mode d’organisation du couple prend une forme religieuse comme civile. Il est formé en France par l’échange des consentements recueillis publiquement par un officier d’état civil. Le titre V du livre premier du Code civil français y est ainsi consacré : conditions de formation, annulation, divorce, etc.
Avant la loi 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, le mariage permettait l’union d’un homme et une femme qui s’unissaient pour vivre en commun et fonder une famille. La loi reconnait le droit au mariage des personnes de même sexe, les autres conditions demeurent, comme consentement aux obligations nées de l’union conjugale ou différentes interdictions : bigamie, mariage entre collatéraux, âge de 18 ans révolus (article 144 du Code civil).
Le débat sur le mariage pour tous caractérise la place particulière de l’homosexualité dans la société française. Supprimée en 1990 de la liste des maladies mentales de l’Organisation mondiale de la santé, l’homosexualité connait en effet une dépénalisation progressive. L’interdiction de la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle est ainsi incluse dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne adoptée le 7 décembre 2000\footnote. L’homophobie est également pénalisée en France (loi n°2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale).
Plusieurs projets se succèdent du Contrat d’union civile au Pacte civil de solidarité (PACS) qui se situe entre le mariage civil et le concubinage. Ce partenariat permet aux pacsés indépendamment de leur sexe d’organiser leur vie commune mais ne règle pas les problèmes de succession et de filiation et premier lieu desquels les questions liées à l’autorité parentale.
La proposition de loi relative au pacte civil de solidarité fait déjà l’objet en 1999 d’un débat houleux et de nombreux amendements. Le PACS est par ailleurs complété en 2006 et 2007 mais la question de la filiation est toujours en suspens.
La campagne présidentielle du printemps 2012 voit la question du mariage homosexuel relancée avec l’engagement 31 du projet de François Hollande, alors candidat à la Présidence de la République.
Ce dernier déclare qu’il ouvrira le droit au mariage et à l’adoption aux couples homosexuels. Le projet de loi est présenté en Conseil des ministres le 7 novembre 2012 par Christiane Taubira. Après un débat parlementaire difficile, le 17 avril le Conseil constitutionnel valide le texte, la promulgation intervenant au journal officiel le 18 mai 2013.
Du vocabulaire
En parallèle au débat parlementaire, se développe une forte vague de contestation qui divise l’opinion publique La place des médias dans le débat entourant l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe est centrale. A la fois relais d’information et organes partisans, ils se font l’écho d’un vocabulaire clivé.
Les outils de l’observatoire transmédia nous permettent d’effectuer nombre de recherches et de constituer un corpus de près de 10 000 documents. De même nous déterminons les occurrences les plus fréquentes dans les médias et ce par type de média, par période puis à partir de ces résultats nous procédons à différentes analyses de cooccurrences.
Certaines sont davantage liées à certains types de support (presse papier ou web, blog, radio) comme d’acteur médiatique. L’utilisation de tel ou tel vocabulaire pourra alors dépendre de l’orientation politique ou polémique ou d’une recherche de neutralité.
Une première approche lexicométrique nous conduit ainsi à isoler chacune de ces expressions. La première, “Mariage pour tous”, prend une forme partisane dans le sens de la défense du projet de loi. La question est posée : le mariage ne devrait-il pas être ouvert à tous sans discrimination ?
Les expressions dérivées de « mariage entre personnes de même sexe » prennent une forme plus juridique évoquant une réalité technique se voulant non clivée, descriptive. Comme nous l’évoquions, la loi du 17 mai 2013 reprendra ces termes.
Les termes « gay », « homo » et « homosexuel » se veulent plus polémiques. Ils renvoient en effet directement à la préférence sexuelle, certains n’hésitant pas à présenter le projet de loi non plus comme égalitariste mais au contraire comme communautariste.
A partir des quelques 10 000 documents de notre corpus de 2012 nous voyons que l’expression « mariage pour tous » connait une émergence tardive. Ce sont les termes courants sexualisés qui dominent d’abord, « homosexuel », « homo » voire « gay ». En décembre toutefois, le syntagme « mariage pour tous » connaîtra le plus d’occurrences, devançant alors « mariage homosexuel » et « mariage gay ».
La prédominance de l’expression « mariage pour tous » peut s’expliquer selon plusieurs hypothèses. Tout d’abord, il serait possible de retenir que la stratégie gouvernementale de communication a fonctionné. L’utilisation de cette expression dont le cadre cardinal de sens est mélioratif équivaudrait alors à une adhésion généralisée, tout au moins majoritaire de la presse au projet de loi. Cette hypothèse se doit toutefois d’être nuancée. Il est en effet possible de relever un deuxième phénomène, lié au temps médiatique resserré du web : il faut publier vite, même s’il s’agit de reprendre sans n’en rien changer un article de l’AFP. Or l’AFP utilise largement ledit syntagme, avec 302 occurrences de septembre à décembre. En outre, une information qui va vite est aussi celle qui se contente de retranscrire les propos tenus par les personnes interviewés, personnalités politiques comme manifestants. Or l’expression « manif pour tous » est plus aisée à reprendre que celle descriptive de « mariage entre les personnes du même sexe ». En dehors du caractère spécifiant de l’expression « mariage homosexuel », ce semble également être sa concision qui semble avoir fait son succès, même dans le cadre objectif de l’Agence France Presse avec 747 occurrences sur la même période. Ainsi, une expression clivée comme proposant un cadre idéologique – l’égalité pour tous comme nécessité démocratique – se trouve peu à peu – du fait même de la dynamique médiatique neutralisée, ce qui peut également s’envisager comme sa réussite.
L’étude que nous présentons ici fera l’objet d’une communication à l’occasion du Workshop Ot-Media organisé les 16 et 17 décembre 2013 à l’Institut national de l’audiovisuel.